Laura

Laura

d'Otto Preminger
1944 - 1h28 - N&B - USA ("Laura")
avec : Gene Tierney, Dana Andrews, Clifton Webb, Vincent Price, Judith Anderson

Vincent Fournols :


"I shall never forget
the week-end Laura died...
"

DANS la série "révisons nos classiques", voici "Laura" d'Otto Preminger, en 1944, avec Gene Tierney, Dana Andrews et Clifton Webb. Pour ceux qui ne l'ont pas vu depuis longtemps, je rappelle simplement la première phrase du film : "I shall never forget the week-end Laura died" ("je n'oublierai jamais le week-end o� Laura est morte..."). Pour ceux à qui ça ne dit pas grand chose, il s'agit d'un classique du film noir. A la différence d'autres classiques devenus des cultes ou des icônes, je trouve que "Laura", non seulement provoque un plaisir attendu, mais également conserve des qualités intrinsèques profondes, qui se dévoilent un peu mieux à chaque vision.

Outre le thème musical rebattu (David Raksin), outre l'originalité de l'intrigue (non, pas de révélation ici !) et les qualités de la photographie (Joseph LaShelle débutant et déjà maître), c'est la construction du film qui m'a fasciné cette fois-ci : notamment de s'apercevoir que l'entrelac des flash-backs et l'utilisation des voix off provoquent un recul qui fait que le spectateur ne peut pas se raccrocher à un présent (procédé en quelque sorte amplifié par Billy Wilder en 1950).

Et ce décrochage du Temps se marie à merveille avec la qualité de l'interprétation : Gene Tierney provoque un charme toujours renouvelé, mais qui fait à chaque fois oublier ses qualités d'actrices, et la redécouverte n'en est que plus agréable. Dana Andrews tient le rôle commun et taciturne du détective de film noir, qui tombe amoureux de l'héroïne. Et Clifton Webb (alors quasiment inconnu au cinéma) incarne un Waldo Lydecker, remarquablement complexe, pète-sec, fragile, et crédible (on imagine George Sanders dans le rôle avant de s'apercevoir que celui-ci l'interprèta dans un remake TV de 1955, "Laura - Portrait for murder" de John Brahm).



...autre originalité [...], Zanuck,
patron de la Fox de l'époque,
[...] imposa de retourner la fin.
Celle-ci s'avéra meilleure
que l'initiale...

Une autre originalité du film est constituée par une mise en route (on dirait aujourd'hui : pré-production) très difficile, un tournage sans histoire, et surtout par le fait que, Zanuck, patron de la Fox de l'époque, et qui s'était initialement opposé au projet, imposa de retourner la fin. Celle-ci s'avéra meilleure que l'initiale et est celle exploitée aujourd'hui ! Par rapport à la première version, elle ne change pas fondamentalement le déroulement final (l'assassin est bien toujours le même), mais resserre le dénouement dans un même lieu (l'appartement de Laura) et insufle une meilleure dimension narrative (focalisation sur la pendule, chronique radio de Lydecker) et tragique.

Conclusion : cassette à ne pas effacer !

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