1001 pattes (fr)

1001 pattes

de John Lasseter, Andrew Stanton
1998 - 1h35 - USA ("A Bug's Life")
sc�nario : John Lasseter, Andrew Stanton
photo : Russell Carpenter
musique (Musique (extraits sur Amazon.com)) : Randy Newman
production : Walt Disney Pictures, Pixar Animation Studios

Sébastien Barré, le 13/02/99 :

TOUT N'EST PAS PETIT chez nos amies les fourmis, et les gaffes du comp�re Tilt sont l� pour le prouver. Le Pierre Richard des herbes grasses est la calamit� comique mais sans chaussure noire d'une petite fourmili�re isol�e sur le petit �lot d'une petite rivi�re. Ing�nieux mais un peu na�f, grand cœur mais incompris, il va par hasard mettre toute la communaut� dans un beau p�trin et sa n�vrotique mais charmante reine sous double dose de Valium.

Toute la troupe

Marcel !

LeBorgne

Shazam !

Quelqu'un à un dico ?

Quelques protagonistes délirants.

L'heure est en effet � la gal�re : Tilt, dans un �lan Lagaffien, vient de d�truire l'Offrande, petit festin ramass� laborieusement par la colonie et cens� calmer les ardeurs d'une bande de sauterelles pilleuses men�e par LeBorgne, s�rement aussi vicelard que notre borgne � nous, mais tout de m�me involontairement plus comique.

L'ultimatum est clair, double ration pour la fin de la saison, ou �a va moucher tout rouge. Tilt se propose alors d'aller chercher de l'aide au del� des verts p�turages, et faute de Belle des Champs ou de vache Milka, ramener au bercail une fine �quipe de combattants. Mais voil�, son choix va se porter sur une troupe de finauds autant adapt�s au bourre-pif que Lara Fabian au prix Nobel. La partie n'est pourtant pas jou�e, et il y aura s�rement de la sauterelle grill�e pour le go�ter...

MarcelN'allons point par 4 chemins, "1001 pattes" est un petit bijou d'animation, et rel�gue loin derri�re lui ses concurrents. L'�cran, du scope bien large, pullule de d�tails, de bruissements d'herbes et de feuilles, de d�connades en tout genre, de micro-sc�nes hilarantes ("petit bisou ?"), de pantalonnades diverses dont Tex Avery ou Chuck Jones n'auraient pas � rougir. On s'en prend plein les mirettes d�s le d�part, et on remercie la V.F. (bien supérieure à la V.O.) pour pouvoir suivre dans le d�tail les Flammes de l'enfer, g�nial num�ro qui nous pr�sentera dans toute leur splendeur les talents absurdes de notre dizaine de comp�res clown-mercenaires.

Car on est bien loin des quelques personnages de "Toy Story" ou "Antz" ("Fourmiz", 1998), ici pas moins d'une douzaine de "graves", une demi-douzaine de second-couteaux attachants, et des bad-guys pur beurre. Parmi nos histrions, des cloportes yougoslaves, une puce ignifug�e, un scarab�e p�p�re, une chenille bavaroise, une mite Schiffer, une mante fakir, une araign�e maternelle, un phasme guind�, une coccinelle m�le (si si) au langage de charretier, et j'en oublie.

D�bauche de magie, d�bauche d'id�es, jusque dans ces s�quences d'apr�s g�n�rique, o� un bêtisier (!!) du film tordrait un �ne mort : perche dans le champ, clap virtuel, "props", personnage en carton, fou rire des acteurs virtuels qui prennent soudain une dimension encore plus grande, c'est du grand art. Vertigineux spectacle par moment, lorsque les acteurs virtuels jouent à être d'autres acteurs virtuels : ainsi ces jeunes fourmis qui présentent un hommage maladroit lors de la petite kermesse en l'honneur des sauveurs, scènes tordantes où l'on saisit parfaitement ces maladresses d'enfants timides face à leur public.

Vous avez la phobie des insectes (et moi m�me je ne me sens pas tr�s bien), pas de panique, tout cela est tr�s stylis�, les petits gars de Pixar ont boss� � limiter le facteur "beurk", en supprimant pas mal de mandibules, de segment et de poils esth�tiquement pas correct, en anthropomorphisant tout ce petit monde (2 bras et 2 jambes dans "1001 pattes", d�marche humaine, et 2 bras et 4 pattes pour "Fourmiz", � l'allure plus "centaure"). Tout le contraire pour nos bad guys les sauterelles, qui ont �t� bien charg�, gagnant au passage une paire de bras surnaturelle !

1001 pattes

1001 pattes

1001 pattes

1001 pattes

1001 pattes

Couleurs, translucidités,
phosphorescences...


On entre vite dans le tableau, et la technique se fait rapidement oublier, � part pour quelques bourreaux de drosophiles tel que moi. John Lasseter a toujours revendiqu� son statut de "storyteller", de conteur, et il se pla�t � rappeler les priorit�s face � la technologie : "art challenged technology, and then technology inspired art." ("l'art d�fiant la technologie, puis la technologie inspirant l'art").

CouetteTir� d'une fable classique d'Esope qui elle m�me inspira plus tard "La Cigale et la Fourmi" d'un gars dont le nom m'�chappe, "1001 pattes" lorgne bien s�r du cot� de "The Magnificient Seven" ("Les 7 mercenaires", 1960) (ou "Les 7 samoura�s" suivant votre pr�f�rence), le tout sous acide (alors comme "The Three Amigos" ?). M�me si c'est moins original (voire un peu creux) du cot� sc�naristique que "Toy Story" ou le plus adulte "Fourmiz", les n'enfants les plus neurasth�niques devraient sans probl�me se poiler, et j'imagine que les grands enfants aussi. Enfin bref, ne nions pas que nous avons tous �t� un jour intrigu� par ce petit monde, et que celui qui n'a jamais mis le nez et tout le reste dans l'herbe me jette la pierre ("sans doute une coutume locale").

Une nouveau film insectoïde, apr�s "Joe's Appartement", "Fourmiz" (DreamWorks), le trashy "Starship Troopers" et des épisodes TV précurseurs de "Insektors" (Fantome, 1993) ? Au délà de la dispute entre DreamWorks et Disney/Pixar (Katzenberg connaissait le projet "1001 pattes" avant de quitter avec fracas Disney pour DreamWorks) Lasseter, papa du film et gourou de Pixar s'exprime : "les insectes sont un sujet id�al pour l'ordinateur. L'herbe, les feuilles au milieu desquelles ils �voluent sont �galement translucides. Le tout forme un univers lumineux et color�. C'est pr�cis�ment ce que nous avons voulu capter dans le film". Pourquoi pas, et c'est en effet tr�s r�ussi visuellement.

Alors que l'action de "Toy Story" se d�roule essentiellement dans un milieu confin� g�om�trique, "1001 pattes" prend place dans de grands espaces peupl�s de formes organiques et de cr�atures bizarroïdes : un �lot de terre et de rocs, une for�t d'herbes, des couloirs souterrains �clair�s par des champignons phosphorescents, tout cela aper�u par le petit bout de l'antenne d'une fourmi...Palettes superbes, �voluant au cours des saisons, très gros travail dans les effets translucides (herbes, feuilles), textures tr�s �labor�es du fait des gros plans sur nos petits amis, �norme boulot sur l'�clairage (certaines sc�nes comportent plus de 120 sources de lumi�res, si si je les ai compt�, et ma concierge me l'a confirm�). Et bien s�r les petits d�tails qui vont bien, les feuilles se font chapeaux, les objets de tout les jours se transforment en autant de villes, canons, tabourets, véhicules, etc.

HeimlichLasseter n'en est pas vraiment � son coup d'essai : "Toy Story" auparavant (avec Stanton non cr�dit�), et autant de courts m�trages brillants et �mouvants ayant marqu� la petite histoire d'un domaine vieux de plus de 30 ans ("Tin Toy", "KnickKnack", "Red's Dream", "Luxo Jr."). Transfuge de Disney vers LucasFilm (division "Computer Graphics" d'ILM), il participe � l'aventure Pixar d�s le d�part lorsque Steve Jobs fonde tout cela en 86 � partir des restes de la division CG d'ILM. Pour en savoir plus, une petite aspirine et lisez l'article "[HISTOIRE/SFX] Pixar, John Lasseter".

C'est en 1991 qu'un premier partenariat est signé avec Disney, portant sur 3 films en 5 ans. Devant l'énorme succès de "Toy Story" (plus de 350 millions de dollars, une des meilleurs recette de tout les temps pour un film d'animation), Pixar demande une ré-évaluation du contrat en 1997 en faveur d'un meilleur partage des coûts/recettes (50/50, la distribution restant le domaine de Disney), et une meilleure "lisibilité" de la marque Pixar (en terme de reconnaissance).

Tilt ("1001 pattes")

Tilt, l'air content de lui
("1001 pattes")



Z ("Fourmiz")

Z, en pleine drague
("Fourmiz")



"Insektors"

"Occupé !"
("Insektors")



"Joe's appartment"

"Pas de Boogie-Woogie..."
("Joe's Appartment")



"Starship Troopers"

"Tiens, attrape la baballe !"
("Starship Troopers")

"1001 pattes" va forc�ment souffrir de la comparaison avec "Fourmiz" de DreamWorks. Il faut clairement aller voir les deux, mais j'imagine votre pr�f�rence pour "1001" si vous avez ce point commun avec une bonne salade que d'�tre truff� de lardons : ils aimeront. "Fourmiz" est un cran au dessus dans l'ironie et le sarcasme, dans son message quasi politique pour junior. "1001 pattes" se permet quelques blagues caustiques, mais reste bon enfant, ce qui n'est pas pr�judiciable à cette grande poilade. Le(s) message(s) est simple mais moins lénifiant qu'un habituel Disney, et Le Monde l'a interpr�t� de cette fa�on : "Cette utopie d'un groupe qui affirme son id�al d�mocratique malgr� toutes les menaces sur un territoire hostile est bien �videmment celle de l'Am�rique et de son imaginaire historique. Il est logique que ce film, pionnier sur le plan technologique, ait besoin de raconter une histoire de pionniers". Merci Le Monde :)

Certains pr�f�reront Woody Allen en Z dans "Fourmiz" au Tilt de "1001 pattes", mais d'autres verront dans l'hyper active et hyper nerveuse reine Atta de "1001 pattes" un personnage plus consistant que la Sharon Stone de "Fourmiz". A chacun de voir, mais on ne peut gu�re r�sister � ce doux dingue de Tilt, et sa propension � planter le plan le plus m�ticuleux.

TiltTechniquement, "Fourmiz" a une (petite) longueur d'avance dans le rendu, dans le visuel, dans le r�alisme, m�me si les deux sont vraiment � la hauteur. Les fourmis y sont moins stylis�es, moins "plastiques", les visages y sont beaucoup plus r�alistes, et pour avoir vu plusieurs fois chaque film, les d�tails et textures y sont ahurissants (jusqu'au prochain :)). De plus, pour les puristes du premier rang comme votre serviteur, certaines techniques et avanc�es d�velopp�es en interne et revendiqu�es chez DreamWorks se remarquent imm�diatement : la gestion des foules de "Fourmiz" est vraiment hallucinante, des milliers ou dizaines de milliers de ch'tites cr�atures g�r�es sans probl�me, marchant, rampant, dansant, le chaos, mais sans bordel. A cet �gard, la colonie de "1001 pattes" est plus "intimiste", limite cheap.

DreamWorks avait dans la foul�e insist� sur ses techniques de rendu de liquide, �l�ment �trangement important dans les fins de ces 2 films. Et l� pas photo non plus, la sc�ne finale de "Fourmiz" est un petit prodige visuel. Pixar n'est tout de même pas en reste, les effets translucides sont superbes, et les palettes plus claires, plus chaudes de "1001 pattes" sont parfaitement en accord avec le ton du film. Coté animation, le talent des animateurs de Pixar s'affirme largement (vraiment) en t�te : une nu�e de personnages tr�s attachants, anim�s comme jamais cela n'avait �t� fait auparavant, des détails incroyables jusque dans les arrières plans (même flous), des petites manières, mouvements de mains qui font la différence.

Pour ma part, j'ai tout de m�me un petit faible pour les moments de bravoure bluffants de "Fourmiz" : "The Ball", l'attaque des termites digne de "Starship Troopers", le sauvetage fantastique de Balla scotch�e sous une basket, la sc�ne finale, tout ceci m'a sembl� plus lyrique, un poil mieux r�alis� (plan de cam�ra, "casting"), et appuy� par une musique (Musique (extraits sur Amazon.com)) bien plus originale que la partition un peu faiblarde de Randy Newman (Musique (extraits sur Amazon.com)). Mais cela se joue dans un mouchoir de poche.

LeBorgneQuelques chiffres, pour briller chez m�m� : � la disposition de Pixar, 10 fois la puissance informatique de "Toy Story", 1000 processeurs op�rant 4 fois plus rapidement que durant la derni�re production (et 3 machines � caf� seulement). Mais toute cette batterie au service d'une complexit� accrue, certaines images ayant n�cessit� plus de 100 heures de calcul. Tu m'�tonnes John qu'on fasse bosser 60 animateurs � plein temps, quand Tilt, le personnage principal, compte pas moins de 707 "avars" (param�tre de contr�le d'animation). Tout ceci vous semble obscur, n'hésitez pas à consulter quelques petits rappels sur l'animation par ordinateur, et les principes de l'animation en g�n�ral.

Ami, si tu n'as pas compris, ce petit bijou est un r�gal, anim� royalement pour le plaisir du petit n'enfant qui reigne en toi le week-end avant de retourner dans la grisaille du boulot.




Final Fantasy : The Movie

Le Futur de L'avenir de Demain : Alors qu'est ce qui se pr�pare ? Visiblement, Lasseter va s'attaquer � l'homme virtuel dans son prochain long (si on excepte "Toy Story 2", pr�vu autrefois pour la vid�o). Que ce soit chez DreamWorks ou Pixar, on sent que ce galop d'essai chez les insectes promet de belles surprises. L'oeil humain �tant extr�mement sensible aux infimes variations du visage, le challenge est de taille, mais pour avoir suivi un peu les publications et rumeurs techniques � ce sujet, je pense que nos petits génies ont maintenant r�solu les derniers obstacles récurrents : simulation de v�tements et texture de peau r�alistes (cf. le dernier court m�trage prim� de Pixar, "Geri's Game"), des cheveux/fourrures et visages au top comme on a pu en observer dans les quelques filtrages bluffant de "Final Fantasy : The Movie" (en esp�rant qu'il ne s'agisse pas d'une ultime production mort-n�e comme "20 000 lieues sous les mers" ou "StarWatchers").

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